La marine chinoise à la conquête du monde
L’Occident va devoir composer avec une grande puissance navale. En sécurisant ses lignes commerciales, Pékin bâtit une grande marine.
C’est un vieux navire, mais il inquiète les voisins de Pékin. La Chine vient de présenter au monde son premier porte-avions. Racheté au gouvernement ukrainien, ce bâtiment de 300 mètres de long a fait sa première sortie mercredi, et son ombre devrait désormais rôder dans les mers d’Asie de l’Est. Tout un symbole. En soi, ce porte-avions ne va pas changer la donne dans la région. À eux seuls, les États-Unis en possèdent onze, et ce gros navire est « une cible de choix » pour les pays qui détiennent des armements sophistiqués, explique Jonathan Holslag, chercheur au centre d’études sur la Chine de la Vrije Universiteit Brussel (BICCS, VUB). « Ce qui est plus significatif, c’est le développement par la Chine de bateaux lance-missiles, de destroyers, de missiles sophistiqués… » Car le porte-avions n’est que le symbole d’une marine en plein développement: la Chine part à la conquête des mers.
source Wall Street Journal
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Intérêts commerciaux
C’est la conséquence logique du développement économique chinois. « Alors que la Chine s’est muée en une nation commerciale aux ambitions mondiales, ses intérêts de sécurité nationale se globalisent également », résume Jonathan Holslag. Or, jusqu’au milieu des années 2000, « le pays donnait l’impression qu’il deviendrait la première grande puissance à ne pas utiliser la force militaire pour soutenir sa croissance économique », rappelle le chercheur dans une publication sur le sujet (« The military implications of China’s economic global policy »). Pékin a opéré un revirement stratégique: après avoir misé sur la sécurisation de ses 22.000km de frontières et de ses 880.000 km² de zone économique exclusive, la Chine se concentre à présent sur la défense de ses intérêts stratégiques mondiaux.
Le pays est hautement dépendant de ses importations de matières premières et tente de sécuriser ses chaînes d’approvisionnement. C’est notamment pour cela que la Chine incite ses entreprises à construire leurs propres chaînes d’import/export: « Pékin est mal à l’aise avec le fait que des entreprises étrangères contrôlent 57% des exportations nationales », note Holslag. Par-dessus tout, c’est la sécurité des liaisons maritimes qui préoccupe Pékin. Quelque 87% des exportations chinoises et 88% de ses importations de pétrole se font par voie maritime. Or Pékin a toujours en tête l’incident de Yinhe, au cours duquel l’US Navy avait immobilisé un navire marchand chinois en route vers l’Iran pendant trois semaines. Et les Chinois sont « particulièrement inquiets du développement des capacités de la marine militaire indienne », souligne Holslag.
Parallèlement, de plus en plus de Chinois travaillent à l’étranger: le ministère chinois des Affaires étrangères s’attend à ce que plus de 100.000 Chinois soient employés outre-mer à l’horizon 2020. Or la sinophobie grandit dans certaines régions. Ces dernières années, une cinquantaine de Chinois ont été tués par des sinophobes, avance Holslag avant de citer une source au sein du ministère chinois du Commerce: « La Chine va devoir développer la capacité de garantir la sécurité de ses travailleurs dans les pays instables. »
Dans un tel contexte, l’ex-Empire du milieu serait « condamné à l’échec face à la concurrence mondiale si elle se concentrait étroitement sur sa sécurité frontalière », a indiqué Zhang Wenmu, un expert en sécurité, à l’agence Chine Nouvelle. Pékin s’emploie donc à développer ses capacités d’intervention.
L’armée populaire de libération s’entraîne à des opérations intégrées air-terre, à des manœuvres à longue distance, à des assauts éclair et autres « opérations spéciales ». D’ici 2020, la Chine devrait produire elle-même un transporteur aérien militaire. Et sur le front naval, la commande de deux navires de remplissement Fuchi class d’une capacité de transport de 12.000 tonnes « va permettre à la marine chinoise de s’engager dans des opérations de long terme à distance », indique Holslag. Des exemples parmi beaucoup d’autres qui indiquent que la Chine est en train de diversifier sa capacité d’action et « trace la voie d’une utilisation plus robuste du pouvoir militaire dans sa politique de sécurité extérieure ».
Un défi pour l’Occident
Cette évolution confronte la Chine et les autres puissances militaires à un nouveau défi: la confiance. L’inévitable musculation de la Chine est considérée comme une menace par l’Europe et les États-Unis. Or Washington et Bruxelles n’ont d’autre choix que de s’y adapter. « Alors qu’il va être de moins en moins possible pour l’Occident de peser sur les choix politiques de Pékin, il devrait tenter d’entraîner les aspirations de la Chine vers une position collaborative », estime Holslag.
Il leur faudrait donc considérer la Chine comme un partenaire majeur de la stabilité mondiale, développer des partenariats militaires. Cela implique de faire pression sur Pékin pour obtenir plus de transparence, mais également de trouver une alternative à l’embargo sur les armes.
Décrété au lendemain du massacre de Tiananmen, il « n’est plus pertinent à un moment où les répercussions de la modernisation militaire chinoise ont lieu à l’extérieur plutôt qu’à l’intérieur des frontières ». Surtout, il « risque d’avoir un effet contre-productif dans la tentative de faire de la Chine un partenaire pacifique de la sécurité mondiale
Frédéric Rohart/l’Echo
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