vendredi 6 novembre 2015

MONDIALISATION ET STRATÉGIES DE DÉVELOPPEMENT DES ETATS AFRICAINS


 Quelles sont les critiques faites à la mondialisation pour le développement de l’Afrique ?
  • la déréglementation des économies nationales ;
  •  la libéralisation exagérée des échanges (APE, intelligence normative);
  • l'hégémonie des grandes entreprises multinationales ;
  •  la normalisation des rapports humains et la disparition des particularités
  • l'émergence d'un standard culturel
  •  l'atteinte à l'environnement et le réchauffement climatique.

Qu’apporte la mondialisation au développement de l’Afrique ?
  • Elle est une étape nécessaire pour permettre aux pays africains de devenir des pays industrialisés et développés, et ne plus être seulement des exportateurs de matières premières.
  • Par les échanges interculturels, elle permet à l'homme africain d'ouvrir ses horizons
  • Les défenseurs de la mondialisation néolibérale la présente comme inéluctable, irréversible et incompatible avec les Etats-nations. Ces derniers sont stigmatisés en tant que structures trop anciennes et inadaptées, devant être remplacées par un gouvernement mondial.

Que faire ?

Somme toute, la mondialisation, à priori, n’est ni bonne, ni mauvaise. Elle sera ce que les Africains en feront. S’y opposer est une attitude futile, car elle est déjà là depuis un moment. Le challenge pour l’Afrique est d’améliorer son capital humain et son capital institutionnel pour pouvoir saisir les opportunités offertes par la mondialisation et juguler les menaces qu’elle impose.

Définition et contexte

La mondialisation est le processus d'ouverture de toutes les économies nationales sur un marché devenu planétaire. La mondialisation est favorisée par l'interdépendance entre les hommes, la déréglementation, la libéralisation des échanges, la délocalisation de l'activité, la fluidité des mouvements financiers, le développement des moyens de transport, de télécommunication. Les entreprises multinationales déterminent leurs choix stratégiques (localisation, approvisionnements, financement, circuits de commercialisation, recrutements, débouchés, investissements...) à l'échelle mondiale, en comparant les avantages et inconvénients que leur procurent les différentes solutions nationales possibles. Le terme de "mondialisation" est surtout utilisé dans le domaine économique, mais celle-ci touche à toutes les activités humaines : industrie, services, commerce, politique, social... Elle concerne aussi la communication et les échanges entre tous les individus de la Terre devenue "village planétaire" et entre les différentes cultures.
Il devient alors très difficile de fonctionner dans un marché uniquement national.

La mondialisation et le vide stratégique africain
Parler de la mondialisation économique et le développement de l’Afrique implique de passer du non-dit au dit, ce qui est un exercice difficile compte tenu de la volonté quasi universelle des belligérants (Etats, multinationales, ONG, organisations internationales…) de masquer la nature de leurs affrontements non militaires. Les travaux menés depuis dix ans sous ma direction au sein de notre cabinet, nous ont permis de jeter les bases de cette grille de lecture indispensable pour décrypter les stratégies d’accroissement de puissance par l’économie et les rapports de force qu’elles génèrent.

L’histoire africaine est dominée par des rapports de force de nature économique identifiables dans les différentes étapes de son développement: la lutte pour la survie, l’esclavage, le partage de l’Afrique et la colonisation, la guerre froide, la conquête territoriale et commerciale, la compétition économique, les affrontements géoéconomiques et concurrentiels. Mais il n’existe pas de culture écrite reconnue sur la guerre économique par le monde académique africain. Ce déficit s’explique par l’absence d’un corpus théorique africain qui s’explique par la dissimulation par les acteurs politique et économique de la finalité des affrontements de nature économique. Les expressions les plus visibles et irréfutables de la colonisation, de la guerre froide, de la guerre économique comme les phases les plus conflictuelles de la mondialisation n’ont pas donné lieu à une amorce de grille de lecture dans les capitales africaines. Cette contribution a pour objectif de combler ce déficit de réflexion, sur une réalité qui devient chaque jour plus démonstrative dans nos Etats, nos assiettes, nos avenirs. Contrairement à d’autre pays comme les Etats-Unis, le Japon, l’Angleterre, l’Allemagne, la Corée du Sud ou la Chine, l’Afrique est très démunie pour aborder cette problématique.

En inventant la mondialisation, les multinationales (en d’autres termes les bras économiques des Etats) ont modifié les rapports économiques entre elles et entre les Etats. A l’image de l’hyper puissance américaine, elles ont ouvert l’ère de l’hyper compétition. Les alliés, aujourd’hui solidaires contre le terrorisme, sont aussi de terribles adversaires commerciaux. Pourtant, cette guerre d’un nouveau genre est la cause de bien des bouleversements, elle est aussi une arme à destruction massive (famille, éducation, culture, avenirs, cohésion sociale, Etat, justice, etc…). Dans la conquête des marchés il n’y a plus d’alliés, uniquement des adversaires. Bien que des règles existent, la lutte a tendance à les occulter. De facto, nous entamons une longue période de tensions en tout genre dont le suivi ne pourra pas se limiter à un discours lénifiant sur la recherche de croissance.

De la guerre froide à la guerre économique : l’impensée de la mondialisation
  • Il ne s’agit nullement de parler des situations, mais des potentialités, parce que la définition globale et transversale d’une stratégie africaine contemporaine post guerre froide en chantier, qui tout en faisant l’inventaire du passif historique, se doit d’intégrer les impératifs stratégiques des intérêts émergents africains en conflits ou en mouvements.

Pourquoi ?
  • Parce que la fonction stratégique en rapport avec la mondialisation, des Etats africains est minorée ou laissée en lisière par les décideurs politiques et/ou les acteurs économiques.
  • L'absence de culture stratégique par pays dans l'espace culturel francophone, rend ridicule certains Etats face aux exigences du nouveau monde qui se dessine. Sans vision conquérante du monde, pas de projection économique et d'anticipation des complexités orchestrées ou à venir.
  • Parce que ces Etats ont toujours sous-traité, à la puissance coloniale, ou aux multinationales, le soin de la réflexion ou de l’analyse stratégique face à la mondialisation. Dans l'ensemble, ces pays sont plus gérés qu'ils ne se gèrent. Or le rapport démographique qui s'annonce, doit et va changer le rapport de forces dans moins de 30 ans.  
  • Parce que les enjeux que nous allons invoquer au cours de la 8ème  édition de ces journées de nationales du Management, soulignent l’immédiateté  donc de l’évaluation, de la réflexion et de l’analyse stratégique africaine face à la mondialisation.

Car la fin de la Guerre froide en l’Afrique, ne s’est nullement traduite par la fin des guerres réelles, bien au contraire la montée en puissance des intérêts en conflits maintient les déstabilisations politiques et économiques du continent. La principale raison est le fait que pour les majors et les anciennes puissances coloniales l’intérêt stratégique de l’Afrique passe du régional au global ou du marginal au prioritaire. L’impensée de la mondialisation par les élites africaines,  génèrent des vides face aux trois enjeux majeurs : l’énergie, la défense stratégique de nos intérêts et l’organisation de notre résilience face à la mondialisation avec ses effets prévisibles et imprévisibles. Si la connaissance des différentes situations a permis de contenir certaines évolutions, la réponse stratégique collective (Union Africaine) et individuel dans 15 ou 30 ans tarde à être configurer.

Mondialisation et stratégie de développement des Etats Africains
La mondialisation a longtemps été considérée à juste titre comme porteuse d’éléments positifs comme la hausse du niveau de vie des populations des pays industrialisés, le processus de négociation des différends commerciaux, la réglementation progressive des échanges et le renforcement des mécanismes de protection par la reconnaissance des brevets internationaux. Mais ce monde « mélangé », produit de la globalisation, n’a pas pacifié l’économie. L’échiquier des rapports de force géoéconomiques est aujourd’hui profondément beaucoup plus multipolaire que le marché n’est global.
  • L’Afrique a-t-elle tiré les bonnes leçons de la colonisation, de la décennie du chaos (1970-1980), du poids de la dette, de ces déficits stratégiques, politiques, des incohérences institutionnelles qui lui ont causé tant de retards et généré une série de pauvretés ?
  • A-t-elle bien mesuré l’ordre de grandeur des menaces qui pèsent sur son avenir géopolitique et géoéconomique ?
  • Quelle stratégie de puissance à développer dans 30 ans en tant que 2ème  puissance démographique au monde ?

On peut se poser des questions.

Dépourvue de grille d’analyse des affrontements économiques, incapable de tirer le bilan de son cheminement stratégique depuis les indépendances, l’Afrique reste aujourd’hui à la remorque du bloc occidental et de la Chine.

Quelle est aujourd’hui  la situation de l’Afrique face au développement ?
L’Afrique n’est plus à l’écart du Monde, elle est devenue attractive et est l’objet de convoitises.
  • Attractive par son marché potentiel de consommateurs sous équipés, dont le pouvoir d’achat augmente : la jeunesse de sa population (en 2025, 1/3 de la population à moins de 25 ans) en fait un marché d’avenir.
  • Convoitée par les grandes puissances et les  puissances émergentes dans le domaine des ressources : ressources énergétiques (hydrocarbures) ou minières mais aussi terres rares (métaux stratégiques indispensables aux industries de haute technologie)  d’Afrique australe. Ses ressources constituent un atout essentiel et  l’Afrique acquiert une position stratégique dans le domaine des matières premières. Ce sont enfin  ses terres cultivables qui sont recherchées par des pays déficitaires en production alimentaire (la location de terres ou leur achat, « land grabbing », vient parfois déstabiliser des agricultures locales).
  • Un continent qui attire les IDE : Dans les années 2000, les investissements internationaux ont doublé et progressent de 30% par an.

Pour sortir de ce déficit stratégique, il devient urgent de réfléchir à de nouvelles grilles de lecture dont la guerre économique ne serait pas absente. Il semble logique de penser à un nouvel arrimage économique aux exigences du monde fondée sur une articulation pertinente entre la construction de la puissance d’un Etat, la maîtrise de la conquête des marchés et le développement des territoires. Ces trois dimensions stratégiques ne sont pas naturellement compatibles.
  • Le pouvoir politique doit se donner les moyens de définir une graduation des enjeux et des priorités dans le court, moyen et long terme par la mise en place d’une pensée stratégique endogène par Etat et au niveau sous-régional. L’Union Africaine est aujourd’hui incapable de le faire. Il s’agit pourtant d’une urgence absolue.
  • La pensée stratégique doit accoucher par la mise en place d’un outil technique de mise en place et de management à savoir: la NATIONALE STRATÉGIQUE (La NS) dans les Etats.