mercredi 14 septembre 2011

ETAT FRANCO-AFRICAIN : STRATÉGIE ET INTELLIGENCE POLITIQUE


Thème 2 : Afrique francophone – France : la relation d’emprise


Par Patrice PASSY


Les neuf (9) points clés de la stratégie d’accoutumance française en Afrique francophone dans une logique d’emprise
 

1. Garder l’initiative dans la création
  La fusion, et la diffusion des connaissances et des standards éducatif et économique (stratégie, conseil, audit, système d’information… Ce sont ce qu’on appelle les métiers stratégiques…). Le savoir est de nos jours, plus que jamais pouvoir.

2. Familiariser les élites des économies africaines avec le développement économique, produit de France.
   Le système éducatif africain reste encore une pale copie du système français, hérité du système colonial. Le trouble naît lorsqu’on s’aperçoit 51 ans après, que personne n’a proposer un système éducatif propre. Il est existe certes des mesurettes nées de nombreuses réformes, mais rien d’innovant.

3. Disposer d’un pouvoir spirituel par le sabre et le goupillon
   Les médias qui sont à ce jour les meilleurs outils de persuasion (ils nous ont convaincu), d’aliénation (ils ont fasciné), de fiction (déformation légitime ou fonctionnelle de la réalité) ont remplacé l’église.

4.   Influencer par le droit, la religion et la culture
   En Afrique francophone, tout ce qui entre dans une norme est considéré comme « normal », alors que ce qui en sort est « anormal ». Ces termes peuvent sous-entendre ou non des jugements de valeur. Or la norme est traditionnellement l’un des modes d’expression privilégiés de la souveraineté. Quand la norme française devient le mètre étalon du jugement français sur les pays africain, les économies, les peuples d’Afrique, celle-ci devient l’habitacle du pouvoir français. En effet, pour qu'une norme, une règle de vie entre en vigueur dans une société, elle doit être acceptée par la majorité (loi du plus grand nombre) ou imposée par un pouvoir.

5.   Acculturer les élites

6.   Formater les outils de contrôle et de fonctionnement de l’économie de la zone Franc.

7.   Cadrer le débat moral sur les échanges
(La bonne gouvernance, la promotion de la démocratie, l’ingérence humanitaire, les droits de l’homme, la mondialisation, l’OMC…).

8.   Gérer les crises internationales par la maîtrise de l’information, l’instrumentalisation des organisations internationale et sous-régionale

9.   Renforcer le pouvoir médiatique comme pouvoir spirituel 

France-Afrique francophone : au commencement était un meurtre

L’emprise française sur les pays d’Afrique francophone est un phénomène historique, économique, et politique longtemps dissimulée par une stratégie d’accoutumance en direction de ses ex colonies. La fin de la guerre froide et la concurrence exacerbée que se livrent les multinationales et les majors pétroliers du fait de la guerre économique pour le leadership mondial, mettent en exergue de manière progressive et précise les mécanismes d’emprise française dans sa zone de confort économique en Afrique.  L’emprise française veut dire, une relation de soumission des pays de la zone franc, considérés comme simples participants et invités de circonstances dans la marche française du monde. Celle-ci n’a été possible qu’au moyen de manipulations et des stratégies « perverses » plus ou moins subtiles qui se sont déployés au niveau des acteurs, des structures, des idées, des images dans les dimensions interpersonnelles, familiales, religieuses, institutionnelles, militaires, économiques, entrepreneuriales, socioculturelles et politiques. 
L’emprise française n’a été possible que par « un tissu de meurtres », que j’appelle le « meurtre africains ». Sa domination, sa présence dans ces territoires constitue toujours un meurtre continu ou l’exécution d’un meurtre psychique, pas toujours symbolique en 2011, même s’il est commis selon les africanistes pour la « bonne cause », pour la démocratie, dans l’intérêt des populations africaines... Un exemple récent nous le confirme…évincer Gbagbo ou Kadhafi, est présenté par la médiacratie française, comme étant une bonne cause pour les peuples Ivoiriens et Libyens.   
Le « meurtre » du processus de démocratique, utile à tout développement harmonieux d’un pays est coutumier en Afrique francophone, surtout en matière de violences faites à la démocratie toujours annoncée par la France comme modèle, mais jamais acceptée par elle, dans la préservation de ses intérêts économiques. Parler de démocratie réelle pour les pays du pré-carré à l’Elysée, est un affront insupportable aux intérêts français. Ces États néocoloniaux n’ont en effet aucun intérêt au développement économique qui, en faisant émerger une classe moyenne, pourrait susciter une contestation du système, et des velléités mal venues de démocratisation. Le « crime est parfait » lorsque cette démocratie inconnue mais idolâtrée par les africains, est en réalité immolée sur l’autel des accords de défense, fondue dans la fournaise des intérêts français, et vidée de son contenu par les « gouverneurs noirs », afin qu’elle ne soit ni transcendée, ni adaptée, et pire jamais pensée par eux-mêmes.
Y a-t-il en Afrique francophone des lieux d’échanges de savoir et de transfert de connaissances sur la démocratie financés par l’Etat en vue de se réapproprier un processus importé qui comporte en lui-même culturellement pour les africains, les germes de division (un gagnant et un perdant). En Afrique francophone « on n’organise pas les élections pour les perdre » (Pascal Lissouba), il n’y a pas d’adversaire politique, il n’y a que des ennemis et un ennemi est fait pour être « assassiné » pardon pour être neutralisé. Lorsqu’on assassine le politique, on assassine la démocratie, le développement des idées, la paix, ainsi que les espoirs d’un développement économique. Le crime parfait français par délégation africaine.

En Afrique francophone, les droits de l’homme s’arrêtent là où commencent les intérêts français

La stratégie d’emprise dans une logique d’accoutumance, est le mode de comportement habituel des intérêts français qui en Afrique a toujours soutenu l’idée selon laquelle, les droits de l’homme s’arrêtent là où commencent les intérêts français. Ces derniers se situent toujours au-dessus des lois françaises et du pays victime ou cible et s’arrogent le droit de vie et de mort, symbolique et parfois réel, sur leurs victimes (l’exécutif). 
Les stratégies « d’embrouille » et de domination que les coups d’Etat permettent de déployer, sont d’autant plus redoutables pour faire faire du surplace à un pays, et habiles pour tuer tous projets multidimensionnels endogènes. La relation d’emprise ignore tout sentiment de culpabilité, sans affect, elle n’a aucune volonté de réparer, ni d’indemniser leurs victimes : les vampires du pétrole ne se voient pas dans le miroir, ni dans le rétroviseur...
En 1980-2011, le retrait par les américains aux français après la guerre froide, du rôle de gendarme de l’occident en Afrique, l’information devenue sans frontières, l’arrivée et l’activisme économique des pays de la BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) mettent sous pression les intérêts exorbitants et privilèges français dans sa zone de confort économique. L’accès de plus en plus accéléré à l’économie de la connaissance, la progression de la "vérité" laisse s’installer le désamour franco-africain. Ce désamour est né de la fin de deux cycles : 
1-le cycle des mensonges (la mariée de force se rend de plus en compte qu’elle est belle et qu’elle ne reçoit ni amour, ni moyens). 
2-Les rapports de domination institués dès la naissance des Républiques sœurs d’Afrique traversent, fait nouveau, une crise : la crise des symboles français en Afrique francophone. Car, la victime subit de plein fouet l’excitation du préfixe multi dans une Afrique en mouvement : multi-choix, multi-confessions, multi-générations, multipartenaires, multi-modèles, multi-offres etc…

Mais la France est maître dans sa zone de confort économique, dans sa relation d’emprise quand c’est nécessaire, elle n’hésite pas à séduire. Toutes les brebis galeuses et tous les traites qui se tournent vers la BRIC, en ces temps difficiles pour la France sont, à défaut d’être sanctionnés par une honteuse condamnation à mort, tente de séduire. La séduction est une stratégie utile pour « apprivoiser » un « patriote un peu trop agité » jusqu’à ce que le rapport de force permette les humiliations et toutes sortes d’attaques (asphyxie financière, diabolisation médiatique, perte du titre ami de la France, humiliation protocolaire et diplomatique, déstabilisations diverse, résolution de l’ONU, Tribunal Pénal International, isolement diplomatique). L’exclusion et la terreur est l’arme Suprême du maître des lieux… Est maître des lieux, celui qui les organise.                                                          
La meilleure stratégie d’organisation est la division, l’éparpillement des forces et énergies dans des divisions ethniques, les guerres fratricides, communautaires, les mises en conflit. Résultat: les politiques africains ne s’aiment pas, n’ont pas confiance en eux et aux autres, ils voient des coups d’Etat partout, même dans leurs toilettes, et s’isolent dans l’ivresse et la solitude du pouvoir.
 
L’isolement est une stratégie éprouvée. 
Les intérêts français sont experts pour monter les membres des familles politiques les uns contre les autres, attiser les antagonismes ethnique et communautaire, colporter des rumeurs de coups d’Etat, divulguer des fausses informations, livrer de faux secrets, faire et défaire les alliances. Pour se défendre ou pour « tuer » par anticipation, ils savent porter des accusations sans preuve avec force et conviction. L’amalgame est hissé au rang de vérité, parce que les dictateurs pensent qu’il n’y a pas de fumée sans feu, oubliant que le vampire, archétype du pervers… se déplace avec un nuage de brouillard que lui-même suscite.
Les intérêts français utilisent le mensonge et les promesses mensongères. Ils culpabilisent subtilement les hommes au pouvoir qu’ils parviennent toujours à faire douter. Ils trouvent toujours d’excellentes justifications pour justifier leurs crimes. Ils sont passés maître dans l’art de la rhétorique perverse et manient, avec maestria, l’art du « double lien » face auquel il est impossible de se décider ou d’agir : « Si je te bats, c’est pour ton bien… », etc.
La règle d’or de cette relation d’emprise qu’elle soit économique, culturelle, financière, politique consiste à ne jamais tenir compte des faits. « Les faits dépendent entièrement du pouvoir de celui qui peut les fabriquer (Arendt, 1992) ». Cette surenchère permanente est la condition de survie de la relation d’emprise : le moindre arrêt de mouvement pourrait permettre une remise en question. Le renversement des accusations constitue une tactique perverse bien rodée (le génocide Rwandais est un excellent cas d’école). La Côte d’Ivoire et la Libye constitue la signature du vampire. La France reporte toujours systématiquement la responsabilité de son acte criminel sur sa victime, prétendument anti-démocratique, dictatrice, prédatrice, sanguinaire. Lorsqu’elle a le courage de dénoncer ou de résister, la médiacratie française les font passer pour des méchants, incompétents, voleurs de deniers publics, dictateurs, fous, ridicules, tricheurs, ce qui les rend doublement victimes.

Lorsqu’ils sont mis en cause, les intérêts français sont prompts à former 
des groupements d’intérêts (ONU, Union Européenne, FMI, Banque Mondiale etc…) et à convaincre du bien fondé de leurs principes sur les droits de l’homme, même lorsqu’ils ont commis des actes criminels ou des délits réprimés par le droit International : les réseaux pervers de la connivence diplomatique entre les puissants sont passés maîtres en manipulation des chefs d'Etat faibles, des institutions et des médias; ils savent actionner les ressorts de l’indignation, de l'aide, et des droits de l'homme pour faire taire, trembler et faire tout accepter. Le cas du Président Abdoulaye WADE demandant à Kadhafi de partir est l'expression même du pathétique africain. 


Les complications sont nombreuses pour les victimes des intérêts français : l’état de stress post coloniale et les dépressions économiques font de cette zone la zone de décroissance continue aux aspirations limitées depuis les « indépendances ».

Quels traitements proposons-nous ?
 
   La première piste que nous allons aborder dans la prochaine livraison est le patient démontage des mécanismes ayant installé la relation d’emprise.



patrice.passy@gmail.com