La connaissance s’acquiert par l’expérience, tout le reste n’est que de l’information. Albert Einstein
Dans l'Etat franco-africain, les détenteurs de pouvoirs depuis 1995 sont généralement entre deux mondes: le monde politique et celui des affaires.
- Comment fonctionne le système d'interconnaissance communautaire africain (réseau d'influence) ?
- Quel est le poids du clan familial ?
- Comment fonctionne les réseaux d'influence français en Afrique ?
- Jusqu'où s'étend leur influence ?
- Quelles sont les menaces que font peser les nouveaux réseaux d'influence sur les réseaux traditionnels ?
Nous allons aborder les trois premiers points des réseaux d’influence franco-africains dans cette première livraison, ainsi qu'une présentation de la construction de la zone d'influence française. La deuxième livraison portera sur les opportunités et menaces qu'apportent les nouveaux réseaux d'influence (africain, sino-africain, afro-français, libano-africain, américano-africain, français, etc...) dans l'Etat franco-africain.
Intelligence
économique et intelligence des crises en Afrique francophone
Enjeu
En Afrique francophone, depuis la fin de la guerre froide,
lentement et progressivement s'est installée une crise d'influence et de
rayonnement dans l'État franco-africain. Cette crise marginale au début,
devient de plus en plus profonde et manifeste, tant au niveau des exécutifs
africains, qu'au niveau des peuples d'Afrique francophone. Elle s'appelle la
crise du temps français qui se traduit par une baisse d’influence française en
Afrique et un emballement de la contestation de la légitimité historique
française dans sa zone de confort économique. La frénésie interventionniste
militaire française en Afrique, la structuration et la montée en puissance d’une
diplomatie économique sont les aspects les plus visibles des réactions
françaises face aux stratégies indiennes, sud-africaines, russes, américaines,
mais surtout chinoises de conquête des marchés africains.
Crise
du temps français en Afrique
Faiblesse
Il y crise parce que nous assistons avec les évolutions
de la coopération internationale en Afrique (la
coopération internationale est une coopération de plusieurs pays sur un sujet
donné, elle peut être bilatérale ou multilatérale), à une rupture des équilibres instables
post coloniaux. Elle est le prélude à des bouleversements, c'est-à-dire
à un emballement des ruptures dans l’«
l'État franco-africain». Cette crise dont les origines se trouvent
dans la mise en œuvre des plans d’ajustements structurels des années 80, est
née de la myopie stratégique française dans sa zone de confort économique. Le
monopole français dans son pré carré est caractérisé par sa capacité à imposer
sa volonté à des régimes forts (éclairés ou
sanguinaires) qu’elle a judicieusement ou parfois maladroitement placée,
pour protéger au mieux ses intérêts. Après la chute du mur de Berlin, la France
a privilégié la « stratégie du
candidat de la France » et/ou celle du « messie africain » en tant qu’arbitre inespéré dans les
conflits africains. Tout observateur aura compris que le déficit stratégique
est certain après la guerre froide. Sans stratégie clairement définie, et
assumée, la France a manqué de réactivité face aux stratégies d’influence, de
conquête des marchés et de positionnement géostratégique des puissances
émergentes (Chine, Inde, Afrique du Sud).
La mariée s’est rendue compte qu’elle est belle
La France subit en Afrique une mondialisation qu’elle n’a pas
orchestrée, et le nouveau contexte mondial remet en question les paradigmes qui
ont fondé les relations France-Afrique francophone. Elle éprouve donc de plus
en plus de difficultés à assembler, maintenir son périmètre de puissance de manière
cohérente et satisfaisante.
L’une des raisons est principalement le glissement du centre de gravité du capitalisme mondial vers l’Asie du Sud et de l’Est, avec de nouveaux pôles au Moyen-Orient.
L’autre raison est endogène : la mariée africaine, colonisée, brutalisée, dominée, s’est en enfin rendue compte qu’elle est belle. Elle souffre de l’excitation du préfixe - multi - (multi-modèle de développement, multi-offre de développement économique, multi-partenaires, multi-confessions, multi-investisseurs…). Comme le chantait Cabrel: ça change tout dedans et ça change tout autour.
La dernière est que même si la France demeure dominante dans le domaine technologique et militaire, les puissances économiques et financières émergentes deviennent en revanche également des puissances politiques et militaires. Elles accentuent les rivalités à propos des ressources non renouvelables. La Chine ayant accumulé des réserves de change et dégagé des excédents d’épargne a pris des initiatives en Afrique qui contribuent à l’affaissement de l’influence française.
L’une des raisons est principalement le glissement du centre de gravité du capitalisme mondial vers l’Asie du Sud et de l’Est, avec de nouveaux pôles au Moyen-Orient.
L’autre raison est endogène : la mariée africaine, colonisée, brutalisée, dominée, s’est en enfin rendue compte qu’elle est belle. Elle souffre de l’excitation du préfixe - multi - (multi-modèle de développement, multi-offre de développement économique, multi-partenaires, multi-confessions, multi-investisseurs…). Comme le chantait Cabrel: ça change tout dedans et ça change tout autour.
La dernière est que même si la France demeure dominante dans le domaine technologique et militaire, les puissances économiques et financières émergentes deviennent en revanche également des puissances politiques et militaires. Elles accentuent les rivalités à propos des ressources non renouvelables. La Chine ayant accumulé des réserves de change et dégagé des excédents d’épargne a pris des initiatives en Afrique qui contribuent à l’affaissement de l’influence française.
Qu'est-ce que l'État franco-africain ?
Force
L’État franco-africain est la communauté d’intérêts entre la
France et les pays de sa zone d’influence. C'est une réalité illustrée par
cette forme d’organisation historique, post coloniale, politique, juridique à
la fois « invisible » et diplomatiquement contraignante qui oriente,
décide, contrôle de manière de moins en moins directe, l’Agir politique,
militaire et économique africain. Un « État à la fois invisible et
visible » qui se trouve au cœur des systèmes avec lesquels les
exécutifs français et africains interagissent pour exploiter et
perdurer.
Cet ensemble de
croisements interactif et interdépendant d'intérêts s’appelle, l’État franco-africain. L’État
franco-africain est donc un cadre d’exercice de l’autorité française, une zone
d’expression de son influence et une entité géographique dans laquelle s’exerce
son rayonnement culturel.
Cet État est composé des pays de l'espace culturel
francophone en Afrique (les États d’Afrique francophone). L’Union Européenne, les USA, et les pays du BRIC se disputent en bonne intelligence, (ils savent passer de la concurrence à la coopération selon le niveau d'intensité des intérêts et les circonstances), les ressources stratégiques des pays du golfe de Guinée. En 2014, "l’espace vital énergétique autonome français" est de plus en
plus confronté avec l’arrivée de nouveaux acteurs, notamment chinois, à une
compétition ouverte. La principale curiosité de
l’ « État franco-africain » réside dans l’absence d’outils et de
méthode de management de cet espace géographique, économique, démographique. Sa
principale lacune est: l’absence de pôles de dynamisme économique due au manque d’offres
de développement économique français pour son espace énergétique vital.
La main qui donne est
au-dessus de celle qui reçoit
La France est le seul pays du monde occidental à disposer
d'une zone géographique dans laquelle elle influence (hard power) et rayonne (soft power). La Chine
influence, mais ne rayonne point, idem pour les USA qui influencent, mais ont du
mal à rayonner en Afrique francophone.
Pour être et durer après la colonisation, la France a organisé
son rayonnement et influence, grâce à quatre outils d'influence: l’aide
(au développement, économique,), la
coopération (scientifique, militaire, politique,
universitaire, économique, policier, culturel...), la monnaie (franc CFA) et la langue française, tout
en sacralisant dans son pré carré des rapports asymétriques. Nous n'allons pas
aborder la question des stratégies d’influence dans cette livraison. Ces mêmes
outils ont été recyclés avec efficacité pendant la guerre froide (1960-1990) et
après (1990-2014).
Est maître des
lieux, celui qui les organise
De la
construction du pré-carré à l'Élysée connexion. 1960-2000
Le terme « pré carré » est cette
expression, empruntée à Vauban, qui désigne le domaine d’influence (ou d’ambition d’influence) de la France en Afrique, qui
correspond à l'espace culturel francophone africain. Les instruments juridiques
qui vont jouer un rôle déterminant pour asseoir la puissance française
sont:
- les accords d'indépendance
- les accords de défense
- les accords de coopération avec pour acteurs de la sécurité du pré-carré, les services de renseignement (notamment le secteur Afrique du SDECE, devenu la DGSE), missions de coopération militaire et bases françaises en Afrique – vont jouer un rôle déterminant pour asseoir la puissance française [1].
Apparaît un
titre étonnant: Ami de la France. Tous les exécutifs africains
ne vont pas lésiner sur les moyens quelques fois de
manière grotesque pour être considérés et appelés: AMI de la France. Titre
aux effets bénéfiques puissants dont le principal est: l'anti coup d'Etat. Ce
titre a toujours été
le sésame pour une longévité au pouvoir assurée. Vous l'avez
compris, les relations franco-africaines « ne se situent pas
seulement sur le plan des relations diplomatiques, elles revêtent un caractère
de coopération entre la France et ces États dans les secteurs les plus
importants de leurs activités [et] se situent sur un plan de liens amicaux et
personnels » Notre expérience accumulée entre les circuits décisionnels
locaux et les réseaux de connivences d'intérêts franco-africains, nous permet
de faire le constat suivant des réseaux d'influence française.
La conséquence de ce choix privilégiant l'humain, (liens amicaux et
personnels, connivences spirituelles) aux exigences protocolaires
du système, est le recours à certaines personnalités,
officiellement hors des institutions.
Que remarque-t-on, lorsqu'on dresse à la demande de nos clients,
la cartographie des réseaux d'influence française et africaine en Afrique ?
Pour
établir cette cartographie, nous utilisons un guide de raisonnement tactique qui
peut être personnalisé, répondant aux 4 questions portant sur les points suivants: Constats - Enjeux -
Stratégie – Objectifs (CESO)
- La plupart de ces réseaux sont vieux : les maçons, les derniers des mohicans, les robes noires, les faiseurs de rois... Ils nous renvoient, au mieux, au début des années 90. Le monde international a évolué depuis, la coopération internationale aussi.
- Ils sont craignent les "chaleurs chinoises" et souffrent d'une méconnaissance patente des évolutions africaines: Ces réseaux ont du mal à passer d’une logique de rente à une logique d’offre de développement économique gagnant-gagnant et sont souvent incapables d’impulser des politiques novatrices.
- Ils fonctionnent en silo et non en grappe. Ils peuvent chasser en groupe pour maximiser les profits, mais à intérêt égal, c'est réseau d'influence contre réseau d'influence.
- Ils sont presque exclusivement composés d'hommes. En Afrique les hommes s’adaptent sociologiquement, les femmes quant à elles doivent garder les valeurs.
- L'influence des réseaux se fait essentiellement "contre" ou "pour" contenir la poussée d'autres réseaux. Ils ne portent pas d'idées fortes, de projets porteurs d'évolution substantielle.
Le système d’interconnaissance en Afrique francophone
En Afrique on ne parle pas de réseaux d'influence, mais d'un
système d'interconnaissance intercommunautaire.
Elle a pour matrice d'influence, l’unité culturelle africaine qui
transcende sa diversité du Nord au Sud. Cette unité existe, car les communautés qui habitent différentes
régions d’Afrique ont forgé et
développé, pendant de nombreux siècles, des principes quasi identiques en ce
qui concerne:
- la gestion des rapports entre personnes,
- des rapports au temps,
- des rapports à la vie et à la mort,
- des rapports au travail et à l’utilisation de ses résultats.
Sur
l'ensemble du continent,
- le groupe,
- la famille prime sur l’individu, l’âge ou plus exactement,
- la vieillesse n’est pas considérée comme une déchéance,
- la parole et l’échange direct sont plus valorisés que l’écrit.
Par-delà la diversité des pays
et régions, ce fond culturel
partagé apparaît comme un modèle organisateur et/ou intégrateur, une base d’influence
et de connivence. Un système qui organise le pouvoir social et politique de
quelqu'un, d'un groupe, qui permet d'agir sur le processus décisionnel, le cours des événements, les choix dans les décisions prises. Il correspond à un:
- modèle organisateur très répandu en Afrique;
- modèle qui imprègne très profondément les mentalités actuelles; les cercles de décisions, les lieux de pouvoir et de partage, les lieux de sagesse. Pour l'avoir compris, Jacques Foccart a été appelé par les acteurs politiques franco-africains, de "guichet unique africain" à Paris.
Ce modèle a généré un système
d'interconnaissance communautaire qui structure les connivences d'intérêts, les
solidarités religieuses, les tontines, la relationalité.
La relationalité dans la mise
en oeuvre des conditions d'influence, est une approche intégrative de l’action
collective, qui intègre l’Homme et ses intérêts dans la communauté, afin de
permettre la circulation des biens, des informations ainsi que l’énergie humaine. Voici comment se présente le système d'interconnaissance
communautaire dans les rapports de pouvoir et d’influence.
Quelques explications sur le premier cercle
Clan
familial:
- Le clan familial permet le contrôle de toutes les autres galaxies d'influence, à commencer par la myriade de conseillers à la présidence
Directeur
de cabinet:
Le directeur de cabinet est le mal aimé des réseaux d'influence. Au coeur de toutes les batailles et conflits d'intérêts il est le guichet unique institutionnel des réseaux d'influence.
- Politique (relation avec les formations politiques, gestion des élus, stratégie, notes d'analyse, plume)
- Technocratique (note d'analyse, gestion de dossiers complexes ou sensibles, relations avec des institutions, mise en œuvre et suivi d'initiative politique);
- Super-intendant (facilitateur, organisateur, gestion d'agenda et communication).
C’est «le collaborateur numéro 1 du Président», qui «organise et
pilote le travail technique du cabinet, «fait le lien» avec l’administration
centrale et le Président et aide ce dernier «à prendre les décisions» et
propose «des arbitrages techniques».
Les
compagnons de lutte:
- Plus discret, moins remarquable, mais encore influents, les amis de longue date réussissent dans une connivence d’intérêts à préserver leur entrée et pousser les digues invisibles du système d'interconnaissance communautaire.
Intelligence économique et intelligence intercommunautaire
La communauté en Afrique joue un rôle important dans le partage et la gestion de l'information. L'information n'a pas une valeur marchande, mais fonctionnelle. Cependant, le poids de la communauté dans la société peut inhiber les initiatives individuelles et diluer les responsabilités des individus. En revanche, cela fortifie les liens communautaires et oriente ainsi le choix de l'activité économique des groupes. Elle développe une solidarité qui maintient un contrôle social permettant, la mise en place des réseaux rampants (informel) de connivence d'intérêts économiques, de lobbying, imbus d'une culture de renseignement économique que l'on active en fonction de(s) l'objectif(s).
Le référentiel culturel peut être considéré comme un atout puissant dans la mise en place d'une connivence intérieure des intérêts privés et publics. Le contrôle social qu'exerce la communauté, le système d’interconnaissance sont des réducteurs d'incertitudes, un puissant filtre des normes donc un vecteur de « codes économiques » ayant une influence décisive pour l'homogénéité du groupe permettant à terme la mutualisation des intérêts des groupes économiques à promouvoir et/ou à défendre.
La communauté en Afrique joue un rôle important dans le partage et la gestion de l'information. L'information n'a pas une valeur marchande, mais fonctionnelle. Cependant, le poids de la communauté dans la société peut inhiber les initiatives individuelles et diluer les responsabilités des individus. En revanche, cela fortifie les liens communautaires et oriente ainsi le choix de l'activité économique des groupes. Elle développe une solidarité qui maintient un contrôle social permettant, la mise en place des réseaux rampants (informel) de connivence d'intérêts économiques, de lobbying, imbus d'une culture de renseignement économique que l'on active en fonction de(s) l'objectif(s).
Le référentiel culturel peut être considéré comme un atout puissant dans la mise en place d'une connivence intérieure des intérêts privés et publics. Le contrôle social qu'exerce la communauté, le système d’interconnaissance sont des réducteurs d'incertitudes, un puissant filtre des normes donc un vecteur de « codes économiques » ayant une influence décisive pour l'homogénéité du groupe permettant à terme la mutualisation des intérêts des groupes économiques à promouvoir et/ou à défendre.
Notre valeur ajoutée
Grande expérience au sein des cercles de décision et au coeur de l'Etat
Nos atouts
Le réseau
Notre connaissance de l'Etat franco-africain, fruit de notre expérience
L'expertise
Nos services
DB CONSEILS vous accompagne dans la compréhension des réseaux d'influence franco-africains, pour mieux développer votre intelligence relationnelle dans le système d'interconnaissance communautaire africain. Notre accompagnement s'articule autour d'un conseil stratégique ensemble, nous diagnostiquons vos préoccupations et au cas par cas, nous vous proposons des solutions sur-mesure adaptées à votre budget et aux réalités locales. Il est une réponse adaptée aux diverses situations et besoins des clients.
Excellente capacité d'analyse TECHNIQUE des complexités locales
Bonne maîtrise des référentiels culturels locauxGrande expérience au sein des cercles de décision et au coeur de l'Etat
Nos atouts
Le réseau
Notre connaissance de l'Etat franco-africain, fruit de notre expérience
L'expertise
Nos services
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Voici les besoins les plus récurrents
- Maîtrise des circuits de décision et d’influence (analyse du processus décisionnel, analyse des réseaux, stratégie de réseautage d’affaires, lobbying et impact relationnel, outils d'aide à la connaissance de la médiasphère)
- Prestations de conseils stratégiques (Actions d’influence et d’orientation des décisions publiques, défense et représentation des intérêts des groupes et acteurs économiques)
- Établissement d’une cartographie décisionnelle selon vos délais (décideurs, bottin de la décision, listing, fiches multiples)
La prochaine livraison
Les opportunités et menaces qu'apportent les nouveaux réseaux d'influence (africain, sino-africain, afro-français, américano-africain, français) dans l'Etat franco-africain.
BIBLIOGRAPHIE
Patrice PASSY
[1] Le syndrome Foccart. La politique française en Afrique de 1959 à nos jours, de Jean-Pierre Bat, Folio inédit, (Paris).
[2] Bagayoko-Penone, Niagalé. 2004. Afrique : les stratégies françaises et américaines. Paris : L’Harmattan.
[3] Gabas, Jean-Jacques, dir. 2005. L’aide publique au développement. Paris : La Documentation Française.
[4] Philippe HUGON Dossier | Afrique : 50 ans d’indépendance — Revue | Évolutions des politiques de développement